Olivier Nord part d’un écran blanc ou noir, comme le peintre part d’une toile vierge, pour composer une image. À l’aide d’un stylet et d’une palette graphique, il compose à l’écran comme un peintre utiliserait un pinceau et une toile. Et l’auteur achève de confondre les genres quand il utilise un procédé argentique pour présenter ses images. Insolés sur papier photographique, présentés à une échelle monumentale, ses Tableaux procèdent autant de la photographie que de la peinture. Il crée une image qui reste toujours apparentée au médium photographique dans le rendu, tout en y associant le geste pictural et la liberté créative dans la forme.
Retrouvant les réflexes du peintre, Olivier Nord crée ses compositions à partir de références photographiques issues de sa production ou de l’actualité, questionnant le statut de l’auteur lui-même. S’appuyant sur la réalité disponible, il en vient à en créer une autre. Cette surréalité devient alors une fiction traitant d’une réalité transcendée. De là cette impression de « déjà-vu » produite par la capacité que l’auteur a de créer des scènes archétypales, entre véracité de l’acte photographique et imaginaire pictural.
La démarche d’Olivier Nord questionne au plus haut point le glissement philosophique opéré en photographie depuis l’apparition du numérique : l’interprétation de la lumière induite par cette technique éloigne le procédé de sa capacité à être empreinte du réel. Et plus : les possibilités de transformation de l’image photographique désormais infinies éloignent la photographie de son statut de document et la rapprochent – techniquement et esthétiquement – du mode pictural. L’intervention numérique apportée sur une image peut ainsi créer un nouvel état de cette représentation qui questionne alors son appellation même. Dans ce contexte, le parti pris radical d’Olivier Nord proclame la naissance d’un nouveau rapport à l’image.